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TRAITEMENT
du
PIED BOT VARUS EQUIN CONGENITAL

Le pied bot varus équin (PBVE) congénital définit un ensemble de distorsions fixant l'extrémité du membre inférieur avec plante orientée en dedans et talon haut situé.
Il importe de distinguer le PBVE commun et isolé, des difformités développées sur un terrain dystrophique, myopathique ou neurologique. Seule la forme commune dite idiopathique fera l'objet de cette étude quant aux aspects néonatals et séquellaires.
Sa fréquence est estimée à un cas pour mille naissances, avec une nette prédominance masculine.

Parmi les nombreuses hypothèses pathogéniques avancées, il est intéressant de rappeler le rôle de la motilité foetale dont la perturbation est retrouvée dans la genèse de nombreux tableaux de la pathologie congénitale des extrémités. C'est le cas de l'inversion du pied - attitude adaptée à l'exiguïté de la cavité utérine et correctible par les mouvements fœtaux- qui aura tendance à persister et se fixer si le confort du foetus se trouve inhibé ou entravé de façon durable.
Les conséquences de cette inversion sur le développement morphologique
1 & dynamique2du pied sont abordées dans un chapitre distinct auquel renvoient les liens. 

Le déséquilibre articulaire induit par la persistance de cette inversion se manifeste très tôt par la rétraction des capsules articulaires situées du côté médial du pied, et l'élongation de leurs homologues latérales. La rapide croissance durant le dernier trimestre accentue ce déséquilibre illustré par la rétraction des  fléchisseurs plantaires et supinateurs, principalement le triceps et le jambier postérieur.

Les processus d'adaptation lors de la mise en charge déforment le rayon latéral qui s'hypertrophie, devient convexe et se double d'une bourse séreuse; les zones comprimées, situées le long de la voûte, s'atrophient et accentuent la plicature et le raccourcissement du versant médial du pied.
Dans certains cas, le membre inférieur développe une torsion qui reste longtemps masquée par l'antéversion fémorale. Paradoxalement, l'imprégnation du schéma corporel ne semble pas entraver la marche ni l'agilité de l'enfant préoccupé surtout par le regard des autres et par le port de chaussure.


La prise en charge à la naissance

1. Le bilan néonatal porte sur l'aspect global du pied, sa trophicité, son degré de souplesse, et sur la recherche d'une malformation associée, principalement une dysplasie de la hanche . La prise de photos ou la confection d'un moule plâtré serviront utilement comme étalon témoin de l'évolution. La radiologie n'est pas d'un grand secours à cet âge, la plupart des repères osseux exploitables - principalement le scaphoïde (naviculaire) - ne sont pas encore radiovisibles.


Type I

Type II

Type III

Les données recueillies à ce stade suffisent à reconnaitre:
- le pied souple et correctible par manipuation ( type I ),
- le pied boudiné et peu maniable ( type II ), et
- l'anomalie complexe (type III) dont la rigidité résiste à toute tentative d'assouplissement . 
Enfin, on tiendra compte durant le suivi médical des convenances familiales, des possibilités d'accès aux soins et des facteurs susceptibles de peser dans le choix d'une thérapeutique et de son accomplissement jusqu'à la maîtrise de la marche.

2. La prise en charge durant les six premiers mois est exclusivement physique3 , elle a pour but d'assouplir les articulations et de détendre dans la mesure du possible les formations musculo-ligamentaires rétractées.  La correction, inspirée de la méthode de Ponseti, est possible par des manœuves passives qui reprennent à l'envers les séquences ayant favorisé l'inversion, c'est à dire qu'on commencera par 'déverouiller' le bord médial qui est rétracté autour du complexe talo-calcanéo-naviculaire, avant de se préoccuper de l'équin. Elle est jugée efficace quand calcanéum est suffisamment mobilisable en rotation latérale et que le scaphoïde s'oriente dans l'axe de l'astragale.  

En pratique les résultats de ce programme correctement exécuté sont constamment bons quand il s'agit de pied bot de type I, à condition de procéder avec douceur, les manipulations menées avec force ou sous anesthésie écrasent les noyaux osseux et endommagent les surfaces articulaires, source de raideur et d'arthrose d'installation précoce. 
D'autre part, la tentation d'aller vite et de réduire l'équinisme avant que le varus du tarse n'ait été complètement corrigé favorise la dislocation de l'articulation médio tarsienne et la constitution d'un pied convexe.


On est donc en mesure, au terme du sixième mois, de se prononcer sur le devenir fonctionnel du pied soumis au traitement physique.

- Le résultat est satisfaisant quand le pied acquiert une morphologie normale et stable, c'est le cas du pied bot type I.

- il est jugé bon quand le tarse postérieur est assoupli au point d'être mobilisable sans effort en flexion dorsale et en rotation latérale, et que le varus du talon est correctible par simple stimulation des péroniers; toutefois, l'enfant n'étant pas encore en âge de marcher, il est imprudent de relâcher la discipline engagée au risque de perdre le gain patiemment acquis. Les manipulations seront  poursuivies, et dès la maîtrise de  la station debout on prescrira le port de chaussures à semelle neutre.

- la constatation d'un varus-équin résiduel  incite à faire la part entre ce qui est dû aux facteurs anatomiques de ce qui relève de la kinésie. Le rythme et la durée des manipulations seront revus, l'éléctrostimulation des péroniers peut améliorer les résultats qui seront réévalués trois mois plus tard, l'indication d'un acte chirurgical sera discutée au terme de  ce dernier bilan.

- Quant au pied demeuré rigide,  il convient d'espacer ou même d'arrêter les manipulations qui ne feront qu'accentuer la fibrose, et   de remplacer le plâtre par une attelle de Denis Browne en attendant  le moment de l'intervention chirurgicale.



La cure chirurgicale

est envisageable dès le 9°mois de façon à préparer l'enfant l' appui plantaire correct dès qu'il commence à se mettre debout et à se construire un schéma déambulatoire le plus normal possible. Il s'agit d'actes chirurgicaux destinés à réduire les attitudes résiduelles: l'équinisme du talon, le varus du tarse et la torsion de l'avant-pied; autant d'actes qui seront menés sous garrot et à travers une voie d'abord5 qui donne aisément accès aux différents versants du tarse.

      L'étape chirurgicale correctement menée doit réaliser les trois temps opéraoires primordiaux:
 
-  la libération du calcanéum de toutes les attaches capsulo-ligamentaires qui entravent sa    mobilisation,
-  la réduction de la subluxation du scaphoide, et
-  la réaxation
6 du complexe tarsien et sa stabilisation par embrochage.

Pied gauche en fin d'intervention

La libération du calcanéum porte tout d'abord sur les formations capsulo-ligamentaires tibio-tarsiennes sur ses trois versants 7médial,  postérieur 8 et latéral.
L'étape suivante expose l'articulation médio-tarsienne et le complexe talus-calcanéum-scaphoïde rétractés autour de l'acétabulum dont le déverrouillage
9 constitue la clef de la cure chirurgicale.
Les gestes complémentaires portent sur
les autres structures anatomiques ( tendons fléchisseurs, jambier antérieur, adducteur du gros orteil, fascia plantaire...), si elles constituent l'ultime entrave à la correction.

Cependant, le souci d'éviter de  réintervenir sur des parties molles remaniées par la fibrose cicatricielle inciterait à tirer le maximum de l'intervention initiale, au  risque de perturber la dynamique du pied ou de fragiliser la  voûte plantaire
10
Par contre, la cure chirurgicale menée "à la carte"  privilégie la fonction plus que la morphologie; aussi se borne-t-on à aborder directement les formations à l'origine de la malposition, puis à lever les obstacles l'un après l'autre.
L'immobilisation du pied en fin d'intervention en léger varus-équin est parfois justifiée par le manque d'étoffe des téguments, ou par le risque d'étirement du pédicule tibial postérieur. Il est sage dans de tels cas de se contenter d'une correction approximative, les défauts mineurs seront levés progressivement par manipulation, à l'occasion des changements de plâtre menés sous analgésie.

 
Les résultats

Il est intéressant de noter que la multiplicité des procédés 11 & variantes techniques n'a pas amélioré les résultats dont les scores jugés satisfaisants stagnent aux alentours de 80%. D'autre part, l'analyse de ces résultats révèle une grande discordance dans l'exploitation des critères considérés. Les divergences d'appréciation sont à mettre sur le compte de la grande diversité des tableaux cliniques qui rend toute tentative  de classification vaine. L'accord ne s'est même pas fait sur la terminologie des attitudes vicieuses, encore moins  sur la nature ou la signification de l'anomalie. De plus, il est surprenant de constater que des résultats jugés excellents se rapportent à des hypothèses étiopathogéniques contradictoires ou discutables.
Le seul terrain d'accord concerne les cas extrêmes, l' évolution satisfaisante du pied bot de type I soumis au seul traitement physique, et les résultats constamment   médiocres dans les cas de type III quelle que soit l'importance de l'acte chirurgical.
Par ailleurs, une bonne fonction cache souvent une morphologie sous-jacente imparfaite; on découvre en effet sur des pieds bien corrigés des stigmates radiologiques de
nécrose ischémique portant sur le scaphoïde, la tête ou le dôme de l'astragale; ou un glissement dorsal du scaphoide qui développerait un cavus chez le grand enfant. 
Le  potentiel évolutif  de ces remaniements est lié à la croissance; c'est l'approche de la puberté qui aiderait à tier une conclusion définitive, en attendant il serait sage de suivre et faire accepter des défauts ( hypotrophie, différence de pointure, torsion tibiale...) qui pourraient régresser à la faveur de la maturation du squelette.

                     Les Séquelles

1. L'équin résiduel du traitement conservateur est entretenu par la fibrose particulièrement dense des parties molles tibio-tarsiennes postérieures. Il relève d'un allongement d'achille complété au besoin d'une capsulotomie postérieure.
Celui du grand enfant est souvent dû à l'hypertrophie de la poulie
13 astragalienne maintenue trop longtemps hors de sa mortaise. La création d'un diastasis péronéo-tibial libère les mouvements de la poulie astragalienne.

2. L'équin réfractaire à la chirurgie fera évoquer un déséquilibre musculaire lié à l'hypotonie des flechisseurs dorsaux et du pédieux, il s'agit en fait  d'un équinisme de l'avant-pied, transitoire, aisément identifiable et mesurable sur un cliché de profil pris en charge.

L'indication chirurgicale (capsulotomie plantaire de Lisfranc complétée ou non par la désinsertion calcanénne des courts flechisseurs) ne sera envisagée que s'il persiste après kinésithérapie active pratiquée pendant trois mois.

3 L'adductus de l'avant-pied est une séquelle complexe dont la signification exacte nécessite un examen minutieux:

- habituellement, c'est une composante du PBVE,  reflet de la  supination de l'avant-pied entrainé par la distorsion du tarse. La correction de ce supinatus est liée à  celle du varus calcanéen et non au port de chaussure à semelle orthopédique, comme on aurait tendance à le conseiller;

- l'autre aspect est celui de l'adductus compensateur d'un valgus excessif du calcanéum, qui est une réaction contre l'affaissement de la voûte plantaire; c'est la meilleure indication du port d'une semelle à coin supinateur et à barre rétrocapitale pronatrice;

- sa persistance  chez le grand enfant se complique d'un flexum du gros orteil, attitude  qui traduit l'effort  développé par  le pied pour amener - lors de chaque appui - le bord médial au contact du sol;

- enfin, l'adductus peut être idiopathique et ne se manifester qu'après la correction du varus-équin, dans ce cas, l'opération de Heymann-Herndon
14  pourrait être envisagée seule ou associée à l'ostéotomie calcanéo-cuboidienne 15 à partir de la quatrième année.

 

4 - Le varus du talon

L'analyse des compte-rendus opératoires confrontée aux données radiologiques rattache souvent cette la genèse de cette distorsion à une dérotation incomplète ou instable du calcanéum.
La réintervention est nécessaire pour la stabilité de la planre, elle est délicate en raison des remaniements qui masquent les repères anatomiques et rendent les gestes laborieux et souvent agressifs.


 - Si le varus est isolé, une réintervention sur les parties molles médio-tarsiennes est préférable à  l'ostéotomie de valgisation 16    du calcanéum qu'on envisagera comme dernier recours à partir de l'âge de quatre ans.

 - En cas de varus associé à l'équin avec  prédominance de celui-ci,  la re-orientatio du calcanéum est complétée soit par la    transposition du jambier postérieur 17 sur le 3ème cunéiforme, après s'être assuré que l'équin intéresse bien l'arrière-pied et    que le risque d'affaissement de la voûte plantaire est négligeable 

- Quant au varus rigide et invétéré constaté chez l'enfant âgé de plus de huit ans, la triple arthrodèse 18 reste  l'unique moyen  de   donner au pied un appui plantaire convenable.

- Enfin, si le varus est lié à une hypotonie des péroniers, c'est-à-dire qu'il  persiste après une période d'observation de trois mois   sous couvert d'une kinésithérapie active, on proposera la transposition du jambier antérieur sur le bord latéral du pied. Les   résultats de cette intervention sont bons malgré la gêne que constitue la chute de la tête du premier métatarsien.

5 - Le pied plat valgus

Ce déséquilibre plantaire est la conséquence:
- d'une libération extensive des parties molles soutenant la voûte plantaire, et aggravée par la   transposition du jambier postérieur; 
- d'une ostéotomie calcanéenne de valgisation ayant sacrifié trop de tissu osseux;
- enfin,d'une correction 'hâtive' de l'adductus compensateur d'un valgus calcanéen préexistant.

Une fois constitué, le valgus évolue vers l'affaissement de la voûte plantaire, au point d'amener la tête de l'astragale puis la malléole tibiale au contact du sol et aboutir en quelques mois à la constitution d'un pied plat valgus douloureux.
Cette évolution peut être stabilisée par le port de semelle à coin supinateur si la voûte plantaire garde un certain degré de souplesse, éventualité qu'on vérifie par l'épreuve de Jack, sinon on proposera la varisation du tarse à la manière de Grice ou par une ostéotomie astragalo-calcanéenne.

6 - L'hallux flexus est:
- souvent associé à l'adductus de l'avant-pied dont les orteils se chevauchent;
- iI peut être dû à la rétraction du fléchisseur propre du gros orteil; ou
- à une correction imparfaite de l'inversion de l'avant-pied, la déformation résulte dans ce dernier cas de l'effort à ramener le bord   interne du pied au contact du sol.
- L'hallux flexus résiduel se développe après réaxation de l'avant-pied.
Sa correction nécessite une ostéotomie métatarso-phalangienne en coin à base dorsale, ou par le procédé du bilboquet.

7 - La torsion tibiale coexiste souvent avec le PBVE,; qu'elle soit médiale ou latérale, elle constitue une gêne à la marche une fois le pied équilibré. Sa correction par ostéotomie tibio-péronière de rotation peut être envisagée à partir de la 4ème année.

8 - Le genu recurvatum résulte de la persistance de l'équinisme chez le grand enfant. L'allongement d'achille et l'arthrotomie tibio-tarsienne et sous-astragalienne postérieure doivent être complétés par la création d'un distasis tibio-péronier.

9
- Les raideurs sont le reflet:
- de la souffrance des cartilages articulaires;
- des adhérences tendino-capsulaires;

- de l'infection postopératoire et des rétractions cicatricielles.
Très peu de cas sont améliorés par la kinésithérapie,

10 - L'obstination à reduire coûte que coûte l'équin par manipulation dorsale de l'avant-pied se termine immanquablement par la dislocation médiotarsienne et le développement d'un pied convexe, séquelle qui  entrave sérieusement l'apprentissage de la marche et prédispose à l'arthrose. 
La persistance de cet état au-delà de la quatième année nécessite le recours à l'ostéotomie médio-tarsienne, aux résultats inconstants.

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